Rétrospective

— Rendre visible le réel de l’exploitation

Une programmation conçue avec Federico Rossin, programmateur et historien du cinéma

Le monde du travail est de plus en plus traversé par une dynamique qui génère précarité, isolement et invisibilité. Comment le cinéma rend compte de ces formes de vie et d’exploitation ? Comment les cinéastes rendent visible les couches marginales de nos sociétés ? Notre traversée touche quatre-vingt ans de cinéma et nous amènera dans quatre continents.

Heddy Honigmann depuis Lima et Samba Félix Ndiaye depuis Dakar nous livrent une image poétique de l’art de la débrouille que femmes et hommes mettent en place pour défier le chômage et contrer l’économie marchande. Ken Loach et Jerzy Skolimowski et leurs ouvriers à Londres, et Lino Brocka et son couple d’amoureux séparés à Manille nous touchent profondément avec leurs récits d’exploitation plein d’humanité. Les enfants sont les protagonistes de deux fables : Sciuscià est une œuvre fondatrice du néoréalisme italien, ainsi que La Petite vendeuse de soleil est le dernier grand film d’un des pères du cinéma au Sénégal, Djibril Diop Mambéty. Le corps et son exploitation ultime – la prostitution – devient le sujet d’un renouveau de l’art cinématographique : de la modernité pour Jean-Luc Godard, et de la post-modernité pour Gus Van Sant. Med Hondo et Lionel Rogosin défient avec leurs films la brutalité de l’oppression coloniale et de la ségrégation des corps et des esprits. Les femmes sont à l’honneur avec deux œuvres féministes allemandes des années 70 : Helke Sander questionne la place des artistes femmes dans le monde post-68 et Helga Reidemeister celui de la famille et du prolétariat au chômage. On terminera ce voyage avec deux films récents qui rendent visible la marginalité des petits boulots de rue et des mineurs saisonniers : Ayi et Mother Lode sont deux portraits précieux pour nourrir la résistance et repenser l’avenir qui nous attend.