Note de lecture : Travail & Démocratie, points d’interrogation

Par Yves Baunay
Note de lecture
Travail et démocratie. Points d’interrogation
Par le collectif Travail et Démocratie.
Editions Les périphériques vous parlent – 2012
www.lesperipheriques.org

avec Clémentine Autain, Sidi-Mohammed Barkat, Yves Baunay, Catherine, Cristina Bertelli, Eric Beynel, Christine Castejon, Nadia Choukroune, Phillipe Davezies, Denis, Nicolas Fasseur, Elsa Fayner, Cathy Fernandez, Gérard Filoche, Estelle Fredet, Yovan Gilles, Patrick Laroche, Philippe Lemoine, Thierry Masquelier, Evelyne Perrin, Dominique Piau, Selma Reggui, Carole Wahnoun.

Signe d’une crise insondable de la politique : les livres, les films, les romans… sur le travail s’accumulent. Le débat politique, lui, continue à ignorer ce que les gens pensent et vivent dans leur travail.
Telle est l’origine de la dernière intuition politique de Claire Villiers : ouvrir enfin le débat public sur la centralité du travail dans la refondation de la démocratie.
Un groupe d’individus de tous horizons s’est constitué en travaillant cette intuition. Le collectif Travail et Démocratie a ainsi vu le jour et a ainsi pris consistance.
Le collectif a survécu à Claire Villiers, en développant des expériences, des initiatives, des productions éditoriales. Il lui rend aujourd’hui hommage avec ce livre « Travail et démocratie. Points d’interrogation ».
Ce livre est un acte militant. Son objectif : sortir le travail réel du déni, de son invisibilité politique. Avec en perspective sa transformation, son émancipation.
Si vous cherchez une thèse supplémentaire sur le travail, n’achetez pas ce livre. Il en existe déjà de nombreuses et d’excellentes qui nous alertent sur tout ce qui se trouve et se joue dans cette activité spécifiquement humaine qu’est le travail.
« Travail et Démocratie » est d’abord une invitation, un encouragement, un appel aux protagonistes du travail à prendre la parole dans leur lieu de travail et sur leur travail. Un appel à penser leur travail. Un appel à prendre le pouvoir et à agir sur leur travail. Ce sont les trois grandes parties du livre « Paroles », « des regards », « l’agir ». Avec en plus une petite histoire du collectif Travail et Démocratie, en forme d’hommage à Claire Villiers.
Pour faire émerger le travail comme question politique de premier plan, le collectif a fait appel à contributions.
Nouvelle illustration de la pertinence de l’intuition du groupe : des auteurs, des expériences diverses d’activités, de réflexion et d’action, des textes ont convergé. Ils constituent la chair du livre. Le collectif les a organisés, ordonnés, présentés, maquettés avec « un sommaire enrichi », des titres, des interpellations, un « fil rouge », des incises, des documents comme « l’appel de Travail et Démocratie » rédigé par Claire Villiers en octobre 2008 !
Ainsi, à partir de textes disparates émanant de personnes humaines, de groupes institués, ne se connaissant pas nécessairement, le collectif Travail et Démocratie a concrétisé sa double ambition. Remettre le travail au centre de la démocratie, de la production du bien commun, de l’élaboration des politiques publiques. En même temps et dans le même mouvement, remettre la démocratie dans le travail, dans l’organisation du travail, dans les choix de production.
Nous sommes tous conscients au sein du collectif que ce travail nous dépasse largement. Mais nous avons osé. En espérant que d’autres prendront le relais.
Si vous aimez les discours pré-construits, bardés de certitudes, les articles où les deux premières phrases nous donnent toute la substance, n’achetez pas ce livre.
Si vous considérez qu’un certain « inconfort intellectuel » est nécessaire pour accéder à cette activité humaine qu’est le travail, si vous cherchez à adopter vous-même une « posture anthropologique » face au travail, à votre propre travail, au travail des autres, alors ce livre est susceptible de vous intéresser.
Mais quelle que soit la façon dont vous lirez et accueillerez ce livre, le collectif « Travail et Démocratie » lira avec beaucoup d’intérêt vos réactions. Il s’en inspirera pour la poursuite de ses travaux.
C’est peut-être une façon de se libérer et de libérer le travail du carcan des rapports marchands pour le faire entrer pleinement dans l’économie du don plus propice à son émancipation.

Yves Baunay
Institut de recherche de la FSU
Animateur du chantier travail
Membre du collectif Travail et Démocratie