Quel avenir du travail voulons-nous ? A l’occasion de son centenaire, l’OIT a lancé une vaste réflexion sur cette question, impliquant ses mandants tripartites et des représentants des champs scientifique, politique, économique, associatif des Etats membres, avec comme
finalité de définir des orientations et recommandations pour lui permettre de remplir sa mission de justice sociale. Mais au fond, en quoi consiste cet exercice qui cherche à définir une vision pour l’avenir ? Implique-t-il une lecture nécessairement critique de la société et de
l’état actuel du monde du travail ? Sur quels indicateurs ou quelles expériences pratiques s’appuie-t-il pour imaginer le travail demain ? Peut-il s’affranchir des puissants intérêts économiques défendus par les lobbys et les politiques nationales ? Quelle conception du travail sous-tend-il ? Contient-il toujours un projet de transformation sociale ?
Nous tenterons de répondre à ces questions en distinguant trois grandes manières possibles d’appréhender l’avenir du travail, portées par des finalités différentes et des acteurs distincts. Ainsi, nous aborderons successivement les utopies et expérimentations passées et actuelles qui cherchent à transformer et démocratiser la société par le travail, les exercices institutionnels de prospectives qui orientent les décideurs politiques et économiques et enfin, les récits littéraires et cinématographiques de science-fiction qui invitent à réfléchir collectivement sur des futurs possibles.
Organisée par le laboratoire GRESCO et l’association Filmer le travail en partenariat avec l’Organisation Internationale du Travail qui fête cette année son centenaire, cette journée d’études abordera ce thème à travers les regards croisés de chercheurs en sciences humaines et sociales (historiens, sociologues, philosophes, etc.), acteurs du monde du travail et artistes, et par le biais de communications orales, d’archives audiovisuelles, de production cinématographique, tout en laissant la place au débat avec le public.
Horaire : 9h00
Lieu : Espace Mendès France / Musée Sainte-Croix
Entrée gratuite / Inscription obligatoire
– Alain Rousset,Président de la Région Nouvelle-Aquitaine,
– Alain Claeys, Député maire de Poitiers,
– Yves Jean, Président de l’Université de Poitiers,
– Christian Papinot, Directeur du GRESCO
– « Enjeux du centenaire de l’OIT », par Cyril Cosme, directeur du Bureau de l’OIT pour la France.
– « Regard sur trois champs de production de l’avenir du travail », par Hélène Stevens, maîtresse de conférences à l’Université de Poitiers (GRESCO EA3815).
« L’idéal socialiste de l’enfant producteur dans la première moitié du XIXe siècle », par Nathalie Brémand, conservatrice des bibliothèques à l’université de Poitiers
Résumé : Le travail occupe une place centrale dans la cité aux yeux des socialistes de la première moitié du XIXe siècle, aussi accorde-t-il une importance particulière à la formation professionnelle dans leurs projets éducatifs destinés à préparer les citoyens de la société future. Mais pour nombreux d’entre eux, le travail n’est pas seulement le but vers lequel tend le processus éducatif. C’est également une activité de l’enfant qui contribue à la vie productive de la collectivité, participe aux frais de son éducation et peut avoir des revenus, devenant ainsi dans une certaine mesure une personne sociale indépendante. J’aborderai ce point de vue en particulier chez Fourier et Proudhon et évoquerai leurs mises en pratiques dans quelques expérimentations sociales.
« Démocratiser le travail : les expérimentations fouriéristes aux usines Godin (1867-1877) », par Michel Lallement, professeur du Cnam, titulaire de la chaire d’Analyse sociologie du travail, de l’emploi et des organisations. Membre du Lise-CNRS-Cnam.
Résumé : Membre de l’école sociétaire, fondateur de familistère de Guise, J.B.A. Godin a mené entre 1867 et 1877, dans son usine d’appareils de chauffage et de cuisson domestiques, une série d’expériences destinées à démocratiser le travail. Cette communication présente les principes, les pratiques et les limites d’une expérimentation particulièrement originale.
« Pratiques, théories et utopies de la démocratisation du travail », par Alexis Cukier, maître de conférences en philosophie à l’université de Poitiers, membre du laboratoire MAPP (EA 2626), et directeur du programme « Travail et démocratie » au Collège International de Philosophie.
Résumé : A partir de quelles pratiques (coopératives, autogestionnaires, conseillistes…) peut-on envisager une démocratisation de l’organisation, mais aussi du procès et de la division du travail ? Comment les théories marxistes et socialistes mais aussi du féminisme matérialiste, du care et de l’écologie politique, permettent-elles de concevoir, aujourd’hui, les conditions de possibilités et les institutions d’un travail démocratique ? Enfin, à quoi pourrait ressembler l’utopie – dans ses dimensions d’imaginaire politique mais aussi de propositions concrètes pour orienter les luttes sociales – d’un « mode de production démocratique », au sein duquel le travail ne serait plus mis au service de l’accumulation de profit mais de la démocratisation de la société ?
« Le mouvement Maker: démocratiser le travail et la production ? » de Isabelle Berrebi-Hoffman, sociologue, chercheure CNRS Lise-Cnam.
Résumé: Depuis le milieu des années 2000, de nouveaux lieux de fabrication (fab labs, hackerspaces, makerspaces…) sont apparus en Europe et aux États-Unis. En expérimentant des formes inédites de fabrication par soi-même (ou Do It Yourself) des biens de consommation, inspirées par un principe de libre accès aux outils et aux savoirs, et de technologies de fabrications numériques (telles l’imprimante 3D), les communautés makers de ces tiers lieux, ambitionnent de transformer leur environnement, leur vie quotidienne, voire la société tout entière. Les makers sont ainsi à l’origine d’un mouvement culturel de démocratisation par la pratique, des manières de faire, de produire, de consommer et d’apprendre. Sur la base d’une enquête réalisée depuis 2010 dans une trentaine de lieux en Europe aux Etats-Unis et au Sénégal, nous nous demanderons quels nouveaux modèles de travail et de coopération s’y fabriquent et à quelles conditions ceux-ci peuvent diffuser au delà des seules expérimentations sociales.
Projection d’une sélection d’archives télévisées d’anticipation du futur présentée par Jean-Paul Diboues, responsable documentaire INA, et Hélène Stevens. En partenariat avec l’INA.
Extrait de 2002 l’odyssée du futur, TF1, lundi 08 février 1982
Table-ronde avec :
– Cécile Jolly, cheffe de projet « Projections sectorielles d’emploi » à France Stratégie (sous réserve)
– Michel Héry responsable de la mission Veille et prospective de l’Institut National Recherche Sécurité
– André Milan, expert praticien au cabinet BPI Group
– Sophie Prunier-Poulmaire, professeure d’ergonomie à l’Université de Nanterre
« Le futur du travail, entre chômage et liberté », par Catherine Dufour, autrice, ingénieure en informatique et chroniqueuse au Monde Diplomatique
Résumé : Les auteur-es de littérature d’anticipation abordent volontiers la thématique du travail comme composante essentielle d’une vie humaine, ou de l’absence de travail, comme élément de libération ou de misère. De Jules Verne à Alain Damasio, elles et ils ont tous-tes leur vision d’un avenir du travail façonné par les machines, dans lequel l’humanité peine à tirer son épingle du jeu.
« Travail et contradiction de classe dans le cinéma de science-fiction du début du XXIème siècle » par Daniel Koechlin, chercheur en civilisation américaine à l’Université de Paris-Sorbonne.
Résumé : Quels changements peut-on observer dans la représentation du travail et des relations de classe dans le cinéma de science-fiction des vingt dernières années, et comment ceux-ci reflètent-ils les changements survenus dans l’économie et la société étasunienne et mondiale ? En effet, la crise économique de 2007-2008, la « Great Recession » qui s’ensuivit, ainsi que l’émergence concomitante d’un grand débat sociétal au sujet des inégalités économiques et sociales (à travers des mouvements comme Occupy Wall Street), ont conduit à de nouvelles manières d’aborder les questions de classe dans des films grand public.
de Jean Auroux, ancien ministre du travail (1981-1982), auteur des lois relatives aux libertés des travailleurs dans l’entreprise, au développement des institutions représentatives du personnel, à la négociation collective et au règlement des conflits du travail et enfin aux comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (1982).