La compétition internationale est un des grands temps forts du festival. Elle rassemble chaque année une sélection d’oeuvres récentes sur le travail qui nous semblent, tant par les thématiques abordées que par leur originalité formelle, propices à alimenter les débats sur l’évolution du travail contemporain et sur les moyens du cinéma pour y parvenir. Force est de constater, au vu du nombre toujours croissant de films que nous recevons, que le cinéma n’en a pas fini de regarder et d’écouter le travail.
Cette année, 20 films documentaires composent cette sélection dont l’enjeu est de rendre visibles des gestes et des situations de travail inédits ou relégués à l’invisibilité, mais aussi de proposer une diversité de regards et d’approches pour placer au centre de l’attention une des questions qui nous préoccupe : « Comment – par quels moyens du cinéma – filmer le travail aujourd’hui ? » Alors que de nombreux films programmés sont tournés au plus proche du réel, en cinéma direct et caméra embarquée pour dire l’urgence à filmer la fragilité de certains parcours de vie, d’autres font la part belle à des démarches plus inattendues en terme d’écriture, de dispositif, de mise en scène et d’invention formelle. Cette tendance est une des lignes de force de la sélection de cette année.
Certains films, faisant écho à la thématique centrale, questionnent la nature du travail et la place de l’humain dans un monde de machines (ferme automatisée dans un lieu non défini ou gigantesque usine de textile en Inde) ; dans ce décor du tout mécanique, des hommes se risquent à prendre la parole face caméra. Des films tournés au plus proches des corps qui disent la rudesse du travail et la lutte pour la survie (travail informel en Argentine et en Italie) ou pour l’émancipation (situation inédite des travailleuses du sexe au Nicaragua nommées médiatrices judiciaires). Des films qui parlent aussi de la force du collectif pour mener des luttes, quand il s’agit de défendre les droits des plus démuni.e.s (le travail de juristes et d’activistes en Chine) ou de « faire corps » pour réaliser une oeuvre commune sur d’immense chantiers de construction.
Hors du collectif, d’autres films dressent les portraits d’anonymes qui ne baissent pas la garde : Ionas le paysan roumain, tenace face aux sangliers qui menacent son champ de maïs ; la colonelle Honorine qui se bat avec courage pour défendre les femmes et les enfants maltraités en République Démocratique du Congo ou encore Mallé l’exilé précaire mais digne et riche de son histoire. Des films porteurs d’humanité et d’un souffle vital, qui parlent des rêves et du désir de s’en sortir de jeunes gens en Corse et en Côté d’Ivoire, à travers des témoignages d’une intensité rare. Des films façonnés par la qualité de la relation qui lie le filmeur et le filmé, par le temps passé et l’écoute qui rendent possibles la confiance et la parole donnée.
Des films « chorals » aussi où s’entrecroise au fil de la narration une mosaïque de personnages, de voix, de parcours, pour embrasser avec virtuosité la complexité d’un métier (celui d’artiste ou de guide de musée) ou d’un territoire (l’histoire passée et présente d’une ancienne ville minière de Russie). Enfin quelques propositions, plus expérimentales, avec des films aux esthétiques originales, certaines aux frontières de la science fiction, d’autres recourant aux images 3D ou à des photographies « parlantes » pour raconter le travail automatisé, les cadences poussées à l’extrême ou les passions et les à-côtés du travail sur un mode volontiers novateur. Des films issus d’ateliers d’écriture, de résidences artistiques ou appartenant à des projets plus vastes de web-documentaire ou de web-série pour dire autrement le travail à l’usine, la situation des réfugiés ou les cultures populaires du nord de la France.
Une sélection à découvrir du 7 au 9 février au TAP Castille, en présence des réalisateurs·trices invité·e·s.
Cette année, 20 films concourent aux 4 grands prix de la compétition internationale : le Grand prix Filmer le travail, le Prix restitution du travail contemporain, le Prix valorisation de la recherche, le Prix spécial du public. Les trois premiers seront décernés par le jury de la compétition internationale et le quatrième par le jury de la ville de Poitiers en tenant compte des votes du public. Les courts métrages de la compétition concourent également au Prix des lycéens et des apprentis et au Prix des détenus du centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne.
Toutes les séances sont diffusées au TAP Castille
En présence des réalisateurs, réalisatrices et d’intervenant.e.s
Horaire : 14h00 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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Rêvent-elles de robots astronautes ? – Un film de Sarah del Pino
Documentaire / France / 25’ / 2017 / Autoproduction
Dans une ferme de vaches laitières autogérée par des logiciels informatiques, tous les désirs de ces travailleuses sont comblés si bien que la seule voix persistante est celle des robots.
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Machines – Un film de Rahul Jain
Documentaire / Inde, Allemagne, Finlande / 71′ / 2016 / Jann Pictures, Pallas Film, IV Films
Dans la gigantesque usine textile de Gujarat en Inde, rythmes de travail et de vie se mêlent en des gestes hypnotiques. Malgré l’épuisement et des conditions de travail inhumaines, des hommes, comme engloutis par leurs machines, prennent la parole.
Horaire : 16h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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En la boca – Un film de Matteo Gariglio
Documentaire / Suisse, Argentine / 25′ / 2016 / Matteo Gariglio Films
À Buenos Aires, la famille Molina vit et travaille dans l’ombre du stade de la «Boca Juniors». Leur gagne-pain : vendre des faux billets pour les matchs de foot, ce qui leur vaut d’entrer constamment en conflit avec la police corrompue. Alors que sa famille s’enfonce dans ce monde souterrain, la mère essaie, en vain, d’empêcher que tout ne s’écroule.
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Girasoles de nicaragua – Un film de Florence Jaugey
Documentaire / Nicaragua / 80′ / 2017 / Camila Films
Au Nicaragua, seize travailleuses sexuelles ont été nommées médiatrices judiciaires par la Cour suprême et contribuent à résoudre les conflits qui se présentent dans leur milieu, mais aussi dans d’autres secteurs de la société. Pour la première fois dans le monde, les travailleuses du sexe ont accès à cette fonction. Le film suit ces femmes au cours de leurs médiations et les accompagne dans la lutte et les actions qu’elles mènent pour la reconnaissance et la régulation du travail sexuel autonome.
Horaire : 20h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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Lutte jeunesse – Un film de Thierry de Peretti
Documentaire / France / 55′ / 2017 / Stanley White
Casting pour le rôle principal du dernier long métrage de Thierry de Peretti, Une Vie Violente. Des jeunes hommes corses témoignent face caméra du rapport qu’ils entretiennent avec leur île, son passé et son présent. À travers les mots se dessine le portrait de toute une génération, entre tentation du nationalisme et rêves d’un nouveau départ, ailleurs.
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Vivre riche – Un film de Joël Akafou
Documentaire / France, Belgique, Burkina Faso / 53′ / 2017 / Vrai vrai Films
Abidjan, Côte d’Ivoire. Nous suivons Rolex le portugais et ses compagnons, des jeunes âgés de 15 à 25 ans, dans leurs activités quotidiennes, arnaque et petit commerce pour survivre. Pour eux, arnaquer les européens c’est encaisser la dette coloniale.
Horaire : 9h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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We the workers – Un film de wenhai Huang
Documentaire / Chine / 174′ / 2017 / Wen Hai Production
De 2009 à 2015, un groupe d’activistes et de juristes chinois défend, non sans risques, les droits des travailleurs. La conscience de classe des ouvriers, émoussée à l’extrême, se reconstruit pied à pied.
Horaire : 14h00 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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Chant acierUn film d’Emmanuel Roy
Documentaire / France / 40′ / 2016 / Pages et Images Productions
Chant Acier est une traversée filmique et littéraire d’une des plus grandes sidérurgies en France, l’usine ArcelorMittal de Fos-sur-Mer. Aux images très plastiques, viennent s’ajouter des mots, qui appellent voix et textes. Ils sont issus d’ateliers d’écriture menés pendant une année par l’écrivain François Bon avec les salariés sur la vie dans l’usine, qui sont autant d’ouvertures sur l’imaginaire des femmes et des hommes au travail. Une écriture à la fois poétique et politique d’une grande force.
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For those who want to fire – Un film de Pierluca Ditano
Documentaire / Italie / 35′ / 2016 / Zelig – School for documentary
Turin. Tous les matins les forains s’installent sur la place du marché. Peppino est parmi eux. Un corps dans la masse, parmi les autres. Il est l’élan, le rythme du film. La caméra suit sa course permanente, alors qu’il arpente la ville ou la place de la République, qu’il pleuve ou fasse déjà nuit, à la recherche de quelques marchandises pour constituer un stand de feux d’artifice.
Horaire : 16h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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ionaş visează că plouă – Un film de Hanciu Dragos
Documentaire / Roumanie / 28′ / 2017 / Aristoteles Workshop Association
Au cœur de la nuit, Ionas, vieux paysan roumain, guette les sangliers qui pourraient ravager son champ de maïs. Il rêve de son père et croit que ce rêve va amener la pluie. Mais d’habitude les sangliers arrivent avec la pluie…
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Maman colonelle – Un film de Dieudo Hamadi
Documentaire / France, République démocratique du Congo / 72′ / 2017 / Cinédoc films,
Andana films
La Colonelle Honorine travaille au sein de la police congolaise où elle est chargée de la protection des enfants et de la lutte contre les violences sexuelles. Alors qu’elle travaille depuis 15 ans à Bukavu, à l’est de la RDC, elle apprend qu’elle est mutée à Kisangani. Sur place elle se trouve face à de nouveaux enjeux. À travers le portrait de cette femme d’un courage et d’une ténacité hors du commun qui lutte pour que justice soit faite, le film aborde la question des violences faites aux femmes et aux enfants en RDC.
Horaire : 20h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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Stand-by office – Un film de Randa Maroufi
Documentaire / Liban, Pays-bas, Roumanie, France / 13′ / 2017
Un groupe de personnes dans un environnement de bureau. Des gestes quotidiens de travail sont observés dans tout le bâtiment. Rien ne semble être déplacé. La caméra circule continuellement et change progressivement notre perception de cet espace. On se pose la question: qu’est ce que signifie ce bureau pour ce groupe de personnes? « We Are Here » est un groupe de réfugiés à Amsterdam qui ne reçoit aucun logement fourni par le gouvernement, mais ne peut pas non plus travailler. Le groupe a décidé de rendre visible la situation inhumaine qu’ils doivent vivre, en ne se cachant plus, mais en montrant la situation des réfugiés qui sont «en dehors de la loi» aux Pays-Bas.
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Mallé en son exil – Un film de Denis Gheerbrant
Documentaire / France / 104′ / 2017 / Atelier documentaire
Mallé exilé, comme tant d’autres qui sont parmi nous et que nous ne voyons pas. Comme eux, il vide nos poubelles, nettoie nos cages d’escaliers et disparait le soir dans son foyer. Mallé le noble, riche de toute l’histoire qui le relie aux grands mythes des Soninkés du Mali. Mallé, les pieds ici, la tête là-bas, a eu envie de m’inviter dans son univers. Depuis quatre ans nous l’explorons.
Horaire : 10h00 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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Sur la lune de nickel – Un film de François Jacob
Documentaire / Canada / 110′ / 2017 / Films camera oscura
Battue par les vents arctiques et suffocant dans la fumée toxique de ses usines, la ville minière sibérienne de Norilsk se recroqueville derrière ses murailles de béton. Pendant que les adolescents de la cité glacée rêvent d’exil, que des travailleurs des mines de nickel évoquent avec nostalgie la camaraderie soviétique perdue, des descendants de prisonniers du goulag et des artistes du théâtre cherchent à faire la lumière sur le sombre passé de Norilsk, enterré sous la glace et la censure. Sur la lune de nickel s’immisce avec tendresse dans la vie de ces habitants du bout du monde.
Horaire : 14h00 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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La limite élastique – Un film de Pauline Pastry
Expérimental / France / 14′ / 2017 / ENSAD
Mon père étant ouvrier, les termes de productivité, de désindustrialisation, de rendement, de maintenance étaient présents au quotidien. Il me sert d’interprète, de modèle de cette figure ouvrière dans une période de l’entre-deux industriel, entre la banalisation de la robotisation et le maintien du travail à la chaîne. Qu’y aura-t-il après mon père ? Quelle sera la place du corps humain dans l’industrie de demain ? Le corps soumis à un travail répétitif peut lui aussi, tout comme un matériau, atteindre sa limite, casser et ne pas retrouver sa forme initiale.
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Quelque chose de grand – Un film de Fanny Tondre
Documentaire / France / 72′ / 2016 / What’s up Films
Ce film est l’histoire d’un chantier colossal, immense. Des milliers d’hommes travaillent collectivement à la construction d’un même ouvrage architectural. Comme un immense théâtre graphique et sonore, chacun y joue une partition bien précise. Malgré la fatigue, les intempéries, le danger, ils sont portés par un seul et même objectif.
Horaire : 16h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ / 3€
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Antão, o invisível – Un film de Sergio da Costa
Documentaire / Suisse / 17′ / 2017 / Alogon Films
Dans un musée d’art, une guide présente un célèbre triptyque pictural à trois publics: des personnes voyantes, des aveugles et un homme sourd et aveugle. Avec des clefs d’accès spécifiques pour chaque public, les visiteurs décryptent une œuvre riche en détails et symboles.
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In art we trust – Un film de Benoît Rossel
Documentaire / Suisse, France / 86′ / 2017 / Close up Films
Le film fait le portrait, avec une grande bienveillance et une pointe d’ironie, d’un métier mystérieux, aussi souvent sacralisé par les uns que dénigré et considéré comme une imposture par les autres. En questionnant les ambitions, les doutes, les stratégies, les compromis, les vaches maigres et les années fastes d’artistes particuliers mais emblématiques de l’ensemble d’une profession, In Art we trust raconte le parcours d’un artiste aujourd’hui, de ses débuts à la fin de sa vie professionnelle. C’est une allégorie vivante, ludique et émouvante sur la figure de l’artiste dans la société contemporaine.
Horaire : 20h30 – Lieu : TAP Castille
Tarifs : 5,5€ /3€
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Dimanche – Un film d’Amandine Faynot
Documentaire / France / 45′ / 2017 / Sanosi production
Un dimanche d’hiver, j’accompagne Alain, président d’une chasse à tir en Picardie, et son groupe de chasseurs, au cœur de la forêt. Je me fais discrète afin d’être acceptée en tant que femme non chasseuse. L’organisation ne laisse rien au hasard, Alain attribue les postes, prépare les plans de traque, rappelle les listes des animaux à prélever. Les règles du jeu sont établies. Au fil des battues, le temps d’un dimanche, je découvre une chasse moderne et codifiée.
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La parade– Un film de Mehdi Ahoudig et Samuel Bollendorff
Documentaire / France / 58′ / 2017 / Les films du bilboquet
La Parade est une fable bien réelle. C’est l’histoire de Cloclo n° 18, majorette, de Jonathan, adepte de tuning, de Freddy, éleveur de coqs de combats et de Gros Bleu, le pigeon voyageur, qui au rythme de l’harmonie d’Oignies et sous le regard bienveillant des géants, vivent leurs passions héritées des traditions ouvrières du Nord.